Veuvage, comment demander ma pension de réversion ?
Les chiffres clés :
Les pensions de réversion sont versées aux personnes des deux sexes, les femmes continuent de constituer l’immense majorité des bénéficiaires, à plus de 89 %.
Statistiquement, les femmes ont plus de risque d’être veuves car au sein du couple, elles sont généralement plus jeunes que leur mari et ont une espérance de vie supérieure. En 2017, l’Insee comptait ainsi 11,2 % de veuves dans la population française, pour seulement 2,8 % de veufs.
En 2018 selon la Dress, les pensions de réversion permettent d’atténuer les inégalités de revenu à la retraite entre les hommes et les femmes en réduisant l’écart de 674 € par mois à 438€.
Un brief historique de la pension de réversion
C’est en 1945, dans la France d’après-guerre, qu’est créé la pension de réversion. Lors de sa création, cette aide était réservée aux veuves des agents de la fonctions publique. Elle a par la suite été étendue aux salariés du secteur privé. Rappelons qu’à l’époque, seulement 40% des femmes étaient considérées comme « actives ». La majorité d’entre elles assumaient la charge du ménage et l’éducation des enfants, un travail essentiel qui n’ouvrait pourtant pas de droits à une pension de retraite. L’absence de revenus fut une des premières conditions pour obtenir la pension de réversion, une protection pour la conjointe à charge.
Les conditions d’obtention se sont assouplies avec le temps pour élargir cette mécanique de solidarité. En 1971, le conjoint à charge peut cumuler sa pension avec celle du défunt par un mécanisme différentiel. En 1972, l’âge pour demander la liquidation de la pension est abaissé de 65 à 55 ans. En 1975, il est possible de cumuler sa pension avec celle du conjoint défunt, avec un système de conditions de ressources.
Dans cet article, nous allons détailler les conditions à remplir pour être éligible à une pension de réversion, estimer le montant de vos droits et vous accompagner dans les démarches administratives pour obtenir cette pension.
Quelles sont les conditions à remplir ?
Pension de réversion : les conditions obligatoires pour l’obtenir
Pas de mariage, pas de réversion ! Une maxime cruelle qui traduit une réalité : en France, seul le conjoint marié peut prétendre à une pension de réversion. Même si vous avez des enfants avec votre concubin / conjoint pacsé, vous ne pouvez pas en bénéficier. Les conditions sont encore plus dures dans le secteur public que dans le secteur privé puisqu’il faut avoir été marié pendant au moins 4 ans (2 ans avant la retraite) ou avoir des enfants pour être éligible.
RÉGIME DE BASE | RETRAITE COMPLÉMENTAIRE | |
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Salariés du secteur privé | Avoir été marié avec le défunt (sans durée minimale). Vous êtes également éligible si vous vous êtes remarié depuis. Être âgé de 55 ans minimum Conditions de ressources annuelles brutes : 21 985,6 € si vous vivez seul 35 176,96 € s’il vit en couple. | Ne pas se remarier après le décès Être âgé de 55 ans minimum ou Avoir 2 enfants à charges – 2 enfants < 25 ans (étudiants) – enfant invalide |
Artisans, commerçant et industriels | Avoir été marié avec le défunt (sans durée minimale). Vous êtes également éligible si vous vous êtes remarié depuis. Être âgé de 55 ans minimum Conditions de ressources annuelles brutes : 21 985,6 € si vous vivez seul 35 176,96 € s’il vit en couple. | Possibilité de se remarier Être âgé de 55 ans minimum Ressources annuelles brutes < 82 272€ (en 2021) |
Agriculteurs non-salariés | Avoir été marié avec le défunt (sans durée minimale). Vous êtes également éligible si vous vous êtes remarié depuis. Être âgé de 55 ans minimum Conditions de ressources annuelles brutes : 21 985,6 € si vous vivez seul 35 176,96 € s’il vit en couple. | Avoir été marié avec le défunt au moins 2 ans Ne pas se remarier après le décès Être âgé de 55 ans minimum |
Professions libérales | Avoir été marié avec le défunt (sans durée minimale). Vous êtes également éligible si vous vous êtes remarié depuis. Être âgé de 55 ans minimum Conditions de ressources annuelles brutes : 21 985,6 € si vous vivez seul 35 176,96 € s’il vit en couple. | Voir le détail ici |
Agents de la fonction publique | Avoir été marié avec le défunt pendant au moins 4 ans (ou 2 avant le départ en retraite du défunt) En cas de divorce avant le décès du défunt, la nouvelle union doit avoir cessée et n’ouvrir aucuns droits Avoir des enfants avec le défunt (condition qui annule les conditions posées sur le mariage) Pas de conditions d’âge Pas de conditions de ressources | Ne pas se remarier / concubinage notoire après le décès du défunt |
Orphelins | Avoir moins de 21 ans à la date du décès Invalidité (annule la condition posée sur l’âge) | Avoir moins de 21 ans à la date du décès (ou moins de 25 ans décès du dernier parent pour le secteur privé) Invalidité (annule la condition posée sur l’âge) |
Votre pension de retraite est constituée du régime de base, de votre retraite complémentaire (qui sont obligatoires) et d’une retraite supplémentaire à laquelle vous êtes libre de souscrire. La pension de réversion suit une logique similaire : des conditions spécifiques existent pour le régime de base et la retraite complémentaire. Ci-dessous notre tableau récapitulatif :
Remariage et pension de réversion : les règles applicables
Si dans certaines situations, le remariage ne prive pas du droit à la pension de réversion, le conjoint survivant doit prendre en compte l’évolution de ses revenus et ceux de son nouveau ménage et en tenir informées les caisses de retraite qui ajusteront le montant de la pension.
Bon à savoir : si le défunt a été marié plusieurs fois, chaque personne avec laquelle il/elle s’est marié(e) peut prétendre à une pension de réversion au prorata de la durée de l’union. Comme dans le tableau précédent, il faut distinguer retraite de base et retraite complémentaire.
Pour le régime de base, les ex-conjoints peuvent se partager la pension du défunt même s’ils ne remplissent pas les conditions d’éligibilité et qu’ils se sont remariés. Si un des ex-conjoints décède, sa part sera distribuée aux ex-conjoints survivants.
Pour le régime complémentaire des salariés du privé (Agirc-Arrco), le partage de la pension de réversion se fait entre les ex-conjoints non remariés. Cependant, la part des ex-conjoints qui se sont remariés n’est pas partagée entre les non remariés.
Conditions d’exemption : la loi 2019-1480 du 28/12/2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille précise que, si le conjoint survivant a été condamné pour meurtre, violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner, violences sexuelles ou menaces de mort à l’encontre du défunt, la pension de réversion n’est pas due.
Calculer le montant de ma pension de réversion
Pension de réversion : quels sont mes droits ?
La pension de réversion correspond à un pourcentage de la pension de retraite que le défunt aurait perçu s’il était toujours en vie. Pour les agents du secteur public, le montant de la pension de réversion représente 50% de celle du défunt (régime de base et complémentaire). Pour le secteur privé, la pension de réversion représente 54% de la retraite de base du défunt et 60% de sa complémentaire dans la plupart des cas.
Dans les faits, bien que ces pourcentages s’appliquent, la pension de réversion est encadrée par un montant minimum et maximum de versement annuel :
- Si le conjoint défunt justifiait d’au moins 60 trimestres de cotisations retraite, vous pouvez bénéficier au minimum d’une pension de 294,23€ par mois soit 3530,79€ par an ;
- Si le conjoint défunt a cotisé pendant moins de 60 trimestres (15 ans), ce minimum sera ajusté proportionnellement à la durée de cotisation ;
- Le montant maximum de la pension de réversion est de 925,56€ par mois soit 11 106,72€ annuel.
Pension de réversion : quelles sont les majorations ?
Ces chiffres ne tiennent pas compte des majorations, dont les 3 principales :
- La majoration de pension en fonction du nombre d’enfants à votre charge = si vous n’avez pas atteint l’âge de la retraite à taux plein (< 65 ans) et que vous ne percevez pas de retraite du régime de base obligatoire, vous bénéficiez de 98,33€ par mois par enfant à charge.
- La majoration pour les familles nombreuses : vous bénéficiez d’une augmentation de 10% sur la pension de réversion actuelle si vous avez élevé 3 enfants ou plus ;
- La majoration pour les bas revenus : si vous avez atteint l’âge de la retraite à taux plein, que vous avez vos droits et que le montant de votre pension mensuelle est inférieur à 874,77€, vous bénéficiez d’une augmentation de 11,1% de votre pension de réversion.
Pour le secteur privé, le versement de la pension de réversion est soumis à des conditions de ressources. Pour les caisses de retraite, ces ressources comprennent :
- Les revenus du travail, le montant du salaire brut annuel lié à votre activité. Sur ce salaire, la loi prévoit un abattement de 30% pour le calcul de la pension de réversion. Par exemple si vous gagnez 20 000€ brut annuel, vous déduisez les 6 000€ d’abattement et ce sont les 14 000€ restants qui seront pris en compte dans les calculs ;
- Les revenus du capital, comme les revenus fonciers. Si vous louez un appartement d’une valeur de 100 000€ dont vous êtes propriétaire, on applique un ratio de 3% à incorporer à vos revenus du travail soit 3 000€ annuel et ce, quel que soit le véritable montant du loyer.
- En reprenant les chiffres de cet exemple, si le conjoint survivant était marié et a au moins 55 ans, elle peut bénéficier d’une pension retraite puisque son revenu annuel, 17 000€, est inférieur au seuil d’une personnel seule (21 985,6€).
- Si le conjoint défunt percevait 30 000€ de retraite, le montant théorique de la pension de réversion est de 16 200€ annuel. Or, le montant maximum est fixé à 11 000€ environ, sans les majorations. Le conjoint survivant pourra prétendre à la différence entre le seuil et son revenu annuel, soit 21 985,6€ – 17 000€ = 4985,6€ annuel ou 415€ / mois environ.
Comment faire ma demande ?
Pour obtenir votre pension de réversion, vous devez remplir le formulaire Cerfa n° 13364*02 pour le secteur privé et l’envoyer à la caisse du régime de retraite de votre conjoint défunt et aux autres caisses auxquelles il a pu cotiser. Rendez-vous sur le site du gouvernement ou de l’assurance retraite pour plus d’informations sur les procédures à suivre.